Origine-Score : un pas important vers la transparence alimentaire mais ne pourrait-on pas aller plus loin ?

Face à la pression des agriculteurs, le gouvernement, en la personne d’Olivia Grégoire, ministre déléguée à la consommation, a annoncé le 22 février dernier, la création d’un Origine-Score pour informer les consommateurs de la provenance des ingrédients et favoriser ainsi les produits nationaux. Ce score prendrait pour modèle le Nutri-score déjà utilisé pour 60 % des produits alimentaires et répondrait à une démarche volontaire des industriels. Les travaux qui vont commencer mi-mars s’inspirent de ceux réalisés par le Collectif En Vérité et de son logo « Info-origine ».

Il s’agit, selon moi, d’une initiative très positive qui représente un pas en avant dans le sens de la transparence alimentaire. Elle va permettre de lutter contre l’opacité des étiquettes et les nombreuses manipulations du « Made in France » dénoncées entre autres, par l’ONG Foodwatch .

Mais est -ce suffisant ? Comment ce score peut-il encore mieux répondre aux besoins des consommateurs ? Faut-il mettre en place un score ou un indicateur ? Ne serait-il pas possible d’aller plus loin et être encore plus transparent ?

Telles sont les questions que je me pose et auxquelles je vais tenter de répondre dans cet article.

Origine Score : un pas en avant vers la transparence alimentaire

L’origine des ingrédients et plus particulièrement le « Made in France » est devenue un outil marketing de plus en plus utilisé, en particulier post covid, mais qui parfois conduit à des abus et des tromperies.

Comme l’a indiqué Bruno Le Maire, sur 1.000 établissements contrôlés concernant l’origine française des produits, 372 ont révélé une non-conformité entre l’origine du produit et l’information affichée sur l’emballage. Sur ces 372 cas, 70 ont montré une volonté de tromper le consommateur sur l’origine.

Le nombre d’exemples ne manque pas. Des mayonnaises, par exemple qui mettent en avant le fait que les œufs sont d’origine France avec un drapeau français visible sur l’étiquette alors que les œufs ne constituent que 8% du produit.

L’Origine-Score viendrait donc palier à ce genre de pratiques peu éthiques, en incitant les industriels à prendre en compte le produit dans son ensemble et non pas à se fixer sur un ou des ingrédients d’origine française.

L’Origine-score aiderait également à pacifier la situation très tendue entre le gouvernement et les agriculteurs français. Ceux-ci souffrent de la concurrence de produits importés qui arrivent sur le marché à des prix moins élevés car produits dans des conditions sociales et environnementales moins strictes.

En incitant les industriels à indiquer l’origine des produits, le gouvernement pense ainsi favoriser ceux dont les ingrédients sont en majorité d’origine française et aider ainsi nos agriculteurs.

Mais que recherchent précisément les consommateurs ? L’origine des ingrédients est-il un facteur déterminant ?

Origine-Score : une façon de mieux répondre aux attentes des consommateurs

L’origine des ingrédients et la composition des produits sont devenues des facteurs clés dans la décision d’achat, comme je l’indiquais dans mon livre « Le marketing de la transparence à l’ère du digital ».

Selon une étude Ipsos publiée en 2013 « Les Français et la confiance alimentaire » pour RESPECT in, hormis le prix, les 4 critères qui influençaient le plus la décision d’achat des consommateurs étaient : le goût du produit suivi de l’origine des ingrédients, de leur lieu de fabrication et des informations concernant leur composition.

Etude Ipsos 2013

Etude Ipsos pour Respectin « Les Français et la confiance alimentaire »- Oct 2013

Une étude de 2023 sur un échantillon de 1000 personnes menée à la demande du Collectif En Vérité par l’institut Appinio a montré que 85% des Français souhaitaient connaître l’origine des ingrédients et matières premières des produits qu’ils consomment et que l’affichage de l’origine des ingrédients sur les emballages impacterait leurs intentions d’achat.

Le collectif a développé un logo : « info-origine » permettant d’indiquer l’origine des ingrédients et le lieu de fabrication.

.Logo Info Origine

En présentant aux consommateurs plusieurs produit avec le packaging seul, puis avec le prix et enfin avec le logo, l’étude a montré que les intentions d’achat fluctuent de façon positive ou négative en fonction de la provenance des ingrédients et du lieu de fabrication.  Ainsi par exemple l’intention d’achat de la marque Nod dont 81% des ingrédients sont d’origine Française passerait de 1.2% à 11.6%.

Etude Appinio sept 2023

Etude réalisée par Appinio en Sept 2023

Cette étude montre donc que les Français préfèrent acheter des produits fabriqués en France en priorisant ceux dont les ingrédients sont d’origine française ou Union Européenne.

L’Origine-Score leur permettrait de pouvoir comparer les produits entre eux et à prix similaire ou peut-être même en payant un peu plus cher, de prioriser les produits véritablement Français.

Score ou indicateur ? 

Dans son intervention du 22 février, la Ministre déléguée à la consommation a mentionné le fait de vouloir utiliser comme modèle le Nutri-Score pour établir l’Origine-Score.

Comme on le sait le Nutri-Score, lancé par le gouvernement en 2016, repose sur une formule mathématique mise au point par le professeur Serge Hercberg et évalue la qualité nutritionnelle du produit sur une échelle à 5 niveaux utilisant un code couleur et sa lettre associée. Nous avons donc à faire à un modèle de notation.

Dans le cas de l’origine des ingrédients, je trouve qu’un système de notation n’est pas approprié. Est-ce qu’un produit qui n’est pas fabriqué en France ou qui utilise des ingrédients non français ou européen est plus mauvais ? Sur quelles bases peut-on porter un jugement de valeur sur une origine ?

De même il existe un grand nombre de produits dont les ingrédients ne pourront jamais provenir du territoire français ni même de l’Union Européenne comme c’est le cas des cafés ou des produits à base de Cacao. Pourquoi une marque de café se retrouverait-elle avec un Origine Score E par exemple ? Cela n’aurait pas beaucoup de sens et tendrait plutôt à discréditer ce système de scoring.

Personnellement je considère donc qu’un indicateur serait plus approprié.

Il faudrait cependant que cet indicateur soit le plus simple et facile à comprendre et réponde aux attentes des consommateurs. Ces derniers veulent savoir principalement quel % du produit est vraiment français.

Dans ce sens, je pense qu’un indicateur comme celui utilisé en Australie serait une solution intéressante.

Il pourrait facilement être adapté avec un logo français (drapeau tricolore ou coq tricolore) et une échelle similaire en intégrant l’information du lieu de fabrication du produit.

Une des limites importantes de tout nouveau score, indicateur ou label est le manque de place sur les étiquettes papier. Comme je l’avais indiqué dans mon article «  Transparence alimentaire : trop d’informations tue l’information » https://transparenceconseil.com/transparence-alimentaire-trop-d-informations-tue-l-information/ , il existe déjà sur les étiquettes une multitude de solutions de guidage présentes : scores (Nutri-Score , Eco Score, Planet score) mais également des labels (Label Rouge, Bleu blanc cœur etc ). Devant cette profusion de messages, le consommateur a du mal à s’y retrouver.

Enfin une autre limite à l’Origine-score réside dans l’aspect trop limité des informations communiquées. L’origine d’un ingrédient secondaire ne pourra pas apparaître pas plus que son origine régionale.

Origine-Score : pouvons-nous aller plus loin ?

Une solution qui permettrait d’aller encore plus loin est celle du E-Label sur laquelle travaille mon entreprise Transparence Conseil  Grâce au QR code il est désormais possible de donner accès au consommateur à des informations plus complètes lui permettant de mieux comprendre les scores et indicateurs, de se former et donc de ne pas rester figé sur une notation simpliste.

Le E-Label permettrait non seulement de donner plus d’informations sur le lieu de fabrication et l’origine de chacun des ingrédients mais également de détailler leur origine régionale. En plus de l’origine, le E-Label donnerait une information plus détaillée sur l’aspect nutritionnel : comprendre le pourquoi d’un Nutriscore A, B, C, D ou E et ainsi d’éduquer le consommateur. Il pourrait également informer sur la composition du produit et les types d’additifs présents, sur les efforts en termes de durabilité, mais également pour les marques ayant opté pour un système de traçabilité via Blockchain d’avoir accès à cette information.

Même si le consommateur n’a pas toujours le temps de s’informer, lui donner accès à toutes ces informations, qui vont lui permettre de faire des choix raisonnés, est un pas en avant vers la transparence alimentaire.

Pour que cette solution fonctionne, il faut qu’elle soit harmonisée et bien structurée. C’est la mission que mon entreprise vous propose de réaliser. Si vous êtes intéressé, n’hésitez pas à me contacter.

Conclusion

 L’Origine score est indiscutablement une initiative tout à fait prometteuse qui va permettre de lutter contre l’opacité des étiquettes et les tromperies. Les efforts à venir du gouvernement et des groupes de travail pour que cette solution voit le jour dès l’été sont louables. J’applaudis également les efforts réalisés par le collectif en Vérité qui ont été à l’origine de cette initiative.

Comme je l’ai développé dans cet article, un indicateur répondrait davantage aux attentes du consommateur.

Enfin la porte reste ouverte pour aller vers plus de transparence alimentaire non seulement en ce qui concerne l’origine des produits mais également les autres domaines tout aussi importants comme le sont la nutrition, la composition, la durabilité ou la traçabilité.